Cloé Harent : Bruit Rose est le terme scientifique qui désigne le son que l’on entend en plaçant un coquillage contre son oreille. Ce bruit, que l’on associe souvent aux vagues, est en réalité celui du sang qui circule. Cette idée d’écho me plait. En explorant les estrans normands, j’ai été émerveillée par toute cette biodiversité, j’ai retrouvé une sensation de mon enfance, celle du coquillage contre l’oreille. Bruit Rose symbolise ce lien intime et universel que chacun peut entretenir avec la mer.
CH: Au départ, j’avais l’idée de réaliser des portraits des habitants de Deauville. Après plusieurs refus, dont l’un particulièrement brutal où un homme m’a dit qu’il ne faisait pas confiance « aux petites filles comme moi », je suis allée me réfugier sur la plage. J’étais fascinée par les coquillages, mais l’idée de travailler sur eux me semblait trop banale. Puis, pour la première fois, j’ai laissé mon instinct prendre le dessus. Ce projet est né d’un basculement : au lieu de forcer une idée, je me suis laissée allée.
BM : Comment avez-vous réalisé le cliché de la nacre exposé dans Beau Magazine ?
CH: J’ai improvisé un studio dans ma baignoire pour recréer une ambiance de plongée, la trouvaille d’un trésor au fond de la mer. J’ai placé un t-shirt au fond et photographié sous l’eau avec un caisson que j’ai fabriqué. En voyant le résultat, j’ai été surprise par des points lumineux, presque comme des étoiles. En réalité, ce sont des particules de poussière du t-shirt illuminées par la lumière.
CH: La question du temps qui passe est centrale dans mes projets. Bruit Rose met en lumière ce qui est encore là, cette biodiversité sous nos yeux, mais pourtant souvent négligée. C’est une ode à la préservation du présent, de ce qui nous entoure, avant que cela ne disparaisse. Plus personnellement, la nature représente pour moi un équilibre essentiel dans ma vie, elle me ressource.
BM : Vous associez souvent des textes à vos séries d’images. Pourquoi ce besoin d’écrire en complément ?
CH : J’aime donner une dimension supplémentaire à mes séries photos avec des textes spontanés, souvent poétiques. Pour Bruit Rose, j’ai écrit après coup, car au début, je culpabilisais de traiter des coquillages. Je trouvais la démarche trop simple. Finalement, écrire ces mots m’a permis de mieux accepter mon travail. Je pense que le texte enrichit mes images, que sans lui, la série semblerait incomplète. L’écrit permet de transmettre quelque chose que l’image à elle seule ne saurait.
BM : Que représente pour vous le prix Tremplin Jeunes Talents ? Le prix vous a-t-il donné de l’élan ?
CH: Le prix Tremplin porte bien son nom : il permet une visibilité et ouvre des opportunités. Non seulement j’ai été exposée à la Fnac, mais j’ai également été publiée sur le site web de Fisheye, le magazine de photographie. Je pars bientôt en résidence à Cadaqués, en Catalogne. Il se passe beaucoup de choses, j’en suis reconnaissante



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